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14 mars 2018

Patrick Rodrigue - prodrigue@lexismedia.ca

Une négligence dans l’entretien des trottoirs qui fait mal

La Ville devra acquitter plus de 17 500 $ en dommages et intérêts à deux citoyennes

Chantier_rue_Gagne

©Patrick Rodrigue

Parce qu’elle a fait preuve de négligence dans l’entretien de ses trottoirs, la Ville de Rouyn-Noranda devra payer des dommages et intérêts dépassant 17 500 $ à deux citoyennes qui ont subi des blessures à la suite de chutes.

Les deux causes ont été entendues le 26 janvier à Rouyn-Noranda par la juge Denise Descôteaux à la Division des petites créances de la Cour du Québec. Dans chacun des recours, la juge a donné raison aux plaignantes.

Par sa passivité et sa nonchalance dans son devoir d’entretien, la Ville n’a pas pris les précautions les plus élémentaires pour protéger la sécurité de ses citoyens -La juge Denise Descôteaux

Dommages physiques importants

Le premier cas est survenu le 3 juillet 2017 sur l’avenue Murdoch. Alors qu’elle retournait à son domicile par un nouveau trajet, la plaignante, âgée de 59 ans, a voulu libérer le passage à une dame qui venait à sa rencontre. Lors de cette manœuvre, son pied droit s’est entièrement enlisé dans une fente. Elle a chuté au sol, tandis que son pied est resté coincé.

Il en a résulté une fracture de l’avant-bras gauche, une fracture de la 7e côte, une sévère entorse à un poignet et plusieurs contusions, notamment au visage. La plaignante a aussi dû être placée en arrêt de travail pendant quatre mois et demi et subir plusieurs traitements.

Le deuxième cas s’est produit le 12 juillet 2017 sur la rue Côté. Il s’agissait pour la plaignante, âgée de 64 ans, d’une première sortie à l’extérieur depuis une opération qu’elle avait subie au sein gauche. Sur le chemin du retour, même si elle connaissait l’existence de l’obstacle, elle a trébuché sur une grosse racine qui traversait le trottoir sur la largeur et elle est tombée le visage contre terre.

Le choc s’est traduit par une fracture ouverte du nez pour lequel quatre points de suture ont été nécessaires. La plaignante a aussi subi une légère commotion cérébrale, tandis que ses lunettes ont été brisées. Enfin, elle a recommencé à ressentir des douleurs à son sein qui venait d’être opéré.

Pas de programme de vérification ou d’entretien

Dans les deux cas, la défense de la Ville de Rouyn-Noranda était assurée par le directeur du Service des travaux publics, Francis Chouinard. Pour le premier dossier, il a fait valoir que, si le trottoir était en mauvais état, son état général était apparent et ne pouvait constituer un piège. Dans le deuxième dossier, il a exposé que la Ville n’avait commis aucune faute dans l’entretien du trottoir, rappelant que la plaignante connaissait depuis des années la présence de la racine.

M. Chouinard a cependant admis à la juge Descôteaux que la Ville ne procédait à des travaux qu’à la suite d’une demande ou d’une plainte puisqu’en l’absence d’un inspecteur consacré à cette tâche, elle n’avait pas connaissance de l’état des 124 km de trottoirs sous sa responsabilité. «On attend que les gens nous appellent avant de faire des réparations», a-t-il précisé.

La Ville sévèrement blâmée par la juge

La juge Denise Descôteaux a statué que, dans le cas de la fissure dans le trottoir, sa présence constituait bel et bien un «élément anormal et surprenant auquel on ne s’attendrait pas», donc un piège au sens de la loi. «La Ville n’a pas pris les précautions les plus élémentaires pour protéger la sécurité de ses citoyens», a-t-elle déclaré.

En ce qui concerne le cas rattaché à la racine, la juge a souligné que la Ville avait laissé perdurer la situation pendant des années et qu’elle n’avait donc pas agi comme une personne prudente et diligente dans l’entretien des trottoirs.

«La Ville n’a mis en place aucun système d’entretien ou de vérification des trottoirs et préfère procéder aux réparations après qu’une plainte par des citoyens soit portée ou, pire encore, après la dénonciation qu’un citoyen se soit blessé, a-t-elle signalé. Par sa passivité et sa nonchalance dans son devoir d’entretien, la Ville n’a pas pris les précautions les plus élémentaires pour protéger la sécurité de ses citoyens.»

Les montants auraient pu être plus élevés

La juge Descôteaux a condamné la Ville à verser des dommages de 2291 $ à la deuxième plaignante. Quant à la première, la juge a indiqué qu’elle lui aurait accordé des dommages supérieurs aux conclusions exposées dans sa décision, mais qu’elle devait les limiter à 15 000 $ puisque le recours avait été intenté devant la Division des petites créances de la Cour du Québec. «Il s’agit d’un choix de la demanderesse, et celle-ci a déclaré en connaître les conséquences au niveau financier», a fait savoir la juge Denise Descôteaux.

La Ville a aussi été condamnée à rembourser des frais judiciaires de 300 $ ainsi que les indemnités additionnelles prévues au Code civil du Québec.

La notion juridique de piège

Une chute sur un trottoir ne donne pas nécessairement ouverture à une réclamation pour dommages subis. À cet égard, la juge Denise Descôteaux a insisté sur la notion juridique de piège.

Citant des décisions de la Cour d’appel du Québec et de la Cour suprême du Canada, elle a mentionné qu’il y a généralement, dans l’idée de piège, une idée de situation dangereuse teintée d’anormalité et de surprise, eu égard à toutes les circonstances.

«Par contre, une situation anormale et imprévisible peut aussi constituer un piège malgré le fait que le danger soit visible», a-t-elle précisé. Et c’est au requérant de prouver qu’il y a eu négligence de la part de la municipalité pour que sa plainte soit retenue.

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