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23 mars 2018

Patrick Rodrigue - prodrigue@lexismedia.ca

Le fly-in/fly-out source de problèmes de santé psychologiques

Fatigue, isolement, conflits conjugaux...

©Gracieuseté - Goldcorp

La mine Éléonore de Goldcorp en Jamésie recourt au navettage aérien pour transporter ses travailleurs sur le site.

Le navettage aérien (fly-in/fly-out) mis en place par certaines sociétés minières pour opérer les mines du Nord québécois pourrait contribuer à l’émergence de problèmes de santé psychologique chez plusieurs mineurs.

L’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) s’est récemment penché sur la question. Comme cette pratique est encore relativement peu fréquente au Québec, l’INSPQ a analysé des écrits scientifiques traitant principalement de l’Australie, un pays où ce mode de gestion de la main-d’œuvre minière est présent depuis les années 1970, ainsi qu’une thèse ontarienne. Ces études, au nombre de 13, couvraient la période du 1er janvier 2005 au 20 mars 2017.

Beaucoup de fatigue et d’isolement

Il ressort de cet examen que la fatigue est le plus important thème abordé par les travailleurs, alors que 45 % des répondants auraient déclaré être souvent très fatigués, tandis que 70 % ont mentionné éprouver des problèmes de sommeil.

Cette fatigue est associée aux longues heures de travail quotidiennes et à des cycles où le nombre de jours de travail consécutifs dépasse celui des jours de repos (par exemple, des cycles 21/14 ou 14/7). L’INSPQ a d’ailleurs noté que plus le ratio entre périodes de travail et périodes de congé est élevé, plus les travailleurs sont à risque de développer un trouble de santé psychologique sévère pouvant même aller jusqu’à la dépression et au suicide.

Le style de vie très particulier qui découle du navettage aérien, avec de longues et fréquentes périodes d’éloignement de la famille et des proches, peut également contribuer à un sentiment d’isolement chez les travailleurs miniers.

Parfois, il est aussi source de conflits conjugaux et d’inquiétudes chez les travailleurs. Le fait de se sentir loin de sa famille, surtout lorsqu’une urgence survient, le manque de participation active à la vie familiale et l’incapacité à conserver une routine de vie stable peuvent engendrer de la détresse. Chez les célibataires, certains ont exprimé des difficultés à maintenir des relations personnelles, ce qui dégraderait leur vie sociale.

Différents et similaires à la fois

L’INSPQ poursuit son analyse en indiquant que même s’il s’agit de pays au climat très différent, les constats qui émergent des études australiennes, notamment sur le plan de la fatigue et de l’isolement, sont semblables à ce qui est observé au Québec. C’est pourquoi il considère que certaines solutions recensées pour l’Australie pourraient être reproduites dans les mines québécoises.

Parmi celles-ci figurent des pratiques organisationnelles qui favorisent l’autonomie des travailleurs quant à la manière d’accomplir leurs tâches ainsi que la mise en place de pratiques qui encouragent le soutien social, notamment le parrainage des nouveaux employés par des collègues plus expérimentés. L’ampleur des problèmes de fatigue excessive pourrait quant à elle être réduite par une révision de la durée des cycles et du nombre d’heures de travail consécutives.

L’INSPQ reconnaît que son exercice n’est qu’un premier pas visant à mieux documenter le travail minier par navettage aérien et ses enjeux pour la santé psychologique. Comme ce mode de gestion pourrait être appelé à se multiplier avec l’émergence de nouveaux projets miniers dans le Nord-du-Québec, il suggère d’effectuer des recherches supplémentaires pour émettre les recommandations de santé publique qui s’imposent.

Des impacts positifs

Tout n’est cependant pas si noir. Selon les études colligées par l’INSPQ, le travail minier qui recourt au navettage aérien ferait aussi apparaître une forme particulière de soutien social entre collègues. En raison de leur proximité durant de longues périodes, il serait ainsi fréquent que des travailleurs veillent les uns sur les autres et se confient sur leurs difficultés personnelles.

De plus, grâce à l’accès plus facile qu’auparavant aux technologies de communication, il est plus facile pour les travailleurs loin de leur domicile de communiquer plus fréquemment avec leurs proches, ce qui contribue à briser l’isolement.

L’INSPQ laisse aussi entendre que le navettage aérien pourrait engendrer des effets positifs. Il recommande notamment de mieux documenter son impact sur les travailleurs et leur famille par rapport au fait de devoir emménager dans une communauté isolée, où le risque de fermeture de la mine plane constamment sur la stabilité du nid familial.

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